À propos de relocalisation (Édito – octobre 2021)
La crise sanitaire a contribué à mettre en évidence les conséquences des délocalisations. Le pays s’est retrouvé en manque de masques, de respirateurs et on s’est rendu compte que nos médicaments dépendaient de matières de base produites en Inde ou en Chine.
Mais la nécessaire relocalisation d’un certain nombre d’activités soulève aussi de nombreuses questions. Va-t-on encourager le repli sur soi, voire le nationalisme ? Va-t-on empêcher l’industrie française de gagner de nouveaux marchés ? Va-t-on affamer des peuples en limitant les exportations de céréales ? Ces questions ne doivent cependant pas nous empêcher de réfléchir à la manière dont ATTAC pourrait apporter sa contribution. Revenons d’abord sur ce qui explique une grande part des délocalisations opérées avant tout par les multinationales, à savoir la recherche de bas salaires et de faibles coûts de production. Pour contrer ces pratiques, sans nécessairement porter tort aux pays concernés, il faut d’une part exiger que les produits importés puissent répondre à certaines normes sociales et environnementales, et d’autre part taxer davantage leur transport (ce qui peut contribuer à limiter les émissions de CO2). Mais il faut aussi prôner des pratiques économiques, en particulier agricoles, qui valorisent le développement des pays pauvres en les protégeant d’importations à bas prix provenant des pays riches et faisant concurrence aux productions locales.
Les relocalisations soulèvent encore de multiples autres problèmes.
Comment par exemple contraindre les multinationales à ne pas trop découper leurs processus de production en plusieurs phases réparties dans différents pays ? Ce qui aboutit, dans le cas de l’automobile par exemple, à ce que plus aucune petite citadine de marque française ne soit entièrement fabriquée en France. Comment limiter les flux financiers qui contribuent à favoriser les actionnaires au détriment des salariés ? Ou encore comment arrêter la numérisation généralisée de la planète qui pourra à moyen terme provoquer la délocalisation de millions d’emplois tertiaires et qui donne aux GAFAM un grand pouvoir de nuisance ? Qu’elles viennent d’ATTAC ou non, les propositions pour taxer les richesses ou limiter le pouvoir des multinationales ne manquent pas, mais force est de constater que, même si certaines mesures paraissent aujourd’hui émerger, le pouvoir du capital reste intact…
La question de relocaliser certaines activités mérite donc largement d’être posée, même si elle peut être dévoyée. A nous de promouvoir des politiques qui favorisent le développement local tout en se prémunissant de l’avidité des banques et des multinationales. On a bien réussi à réouvrir l’entreprise qui fabriquait des masques dans les Côtes d’Armor…